Toudé: Sergent Pepper lonely's hearth club band des Fab Four
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Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band (en français : « La Fanfare du Club des Cœurs Solitaires du Sergent Poivre ») est le huitième album du groupe britannique The Beatles. Cet album est souvent cité comme leur plus grande œuvre et l’un des albums les plus influents de tous les temps par les critiques, figurant entre autres à la première place dans la liste des 500 plus grands albums de tous les temps du magazine Rolling Stone. Enregistré par les Beatles sur une période de 129 jours, l’album est sorti le 1er juin 1967 en Grande-Bretagne et le jour suivant aux États-Unis.
Par son retentissement, par la façon dont il a révolutionné l’industrie du disque, par sa durée de vie dans les hit-parades, par la force avec laquelle il a capté l’air de son temps — il fut la « bande sonore » du Summer of Love —, Sgt. Pepper reste encore à ce jour une pierre angulaire de l’histoire de la musique et de la culture populaire de la seconde moitié du XXe siècle.
Genèse et enregistrement
Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band est enregistré alors que les Beatles s’extraient de la pression liée à la Beatlemania. Les quatre musiciens donnent leur dernier concert au Candelstick Park de San Francisco le 29 août 1966. Après cette ultime tournée des États-Unis, où le décalage ne cesse de se creuser entre ce qu’ils veulent proposer à leur public et ce que celui-ci parvient à entendre au milieu des hurlements et dans des conditions de sonorisation encore balbutiantes, entre ce qu’ils produisent désormais en studio et ce qu’ils arrivent à délivrer sur scène, les quatre Beatles — même Paul McCartney, qui est alors celui qui tient le plus à continuer les tournées —décident que c’en est assez.
A la fin de l'automne 1966, lorsqu'ils reviennent en studio à Abbey Road, les Beatles sont clairs avec George Martin « C'est très simple. Nous en avons marre de jouer en public. Mais cela nous offre un nouveau départ, ne vois tu pas? » dit John Lennon au producteur. « Nous ne pouvons plus nous entendre sur scène à cause de tous ces cris » ajoute Paul McCartney. « Alors, où en sommes-nous? Nous avons essayé de jouer sur scène des chansons de notre dernier album (Revolver) mais il ya tellement d'overdubs compliqués dessus que nous n'avons pu leur rendre justice. Maintenant, nous pouvons enregistrer tout ce que nous voulons, cela n'aura plus aucune importance. Ce que nous voulons, c'est placer la barre très haut, faire le meilleur album que nous ayons jamais réalisé » conclut-il. « Ce que nous disons » poursuit Lennon, « c'est que si nous ne tournons plus, nous pouvons enregistrer de la musique que nous n'aurons pas à interpréter live, et cela veut dire que nous pouvons créer quelque chose qui n'a jamais encore été entendu, un nouveau genre de disque avec de nouveaux genres de sons ». C'est ainsi qu'ils ouvrent une nouvelle période dans leur carrière qui sera connue plus tard sous le nom de The Studio Years (les années studio). En commençant par le plus ambitieux des projets.
Le nom de l’album est lié à la tendance américaine de donner des « noms à rallonge » aux groupes, comme Quicksilver Messenger Service ou Big Brother and The Holding Company. Sur une idée de Paul McCartney, les Beatles décident de former un groupe fictif qui lui aussi aurait un nom très long et partirait en tournée à leur place.
Pour la première fois dans leur carrière, ils disposent de tout le temps nécessaire pour préparer leur album. En tant que groupe vedette et plus grand succès de la maison de disques EMI, les Beatles ont un accès presque illimité à la technologie des studios Abbey Road où ils enregistrent tous leurs albums depuis le début de leur carrière. Les quatre membres du groupe ont une préférence pour les longues sessions de nuit et toute l’équipe d’ingénieurs du son dirigée par le producteur George Martin se tient à leur service, prête à soutenir toutes leurs expérimentations. En tout, 129 jours (de décembre 1966 à avril 1967) seront nécessaires pour enregistrer les treize chansons de l’album ainsi que Penny Lane et Strawberry Fields Forever sorties séparément en single.
À partir des enregistrements des deux précédents albums, Rubber Soul (1965) et Revolver (1966), les goûts des Beatles ont évolué du rhythm and blues, de la pop et du rock 'n' roll de leurs débuts à une variété de nouvelles influences qui va de la musique indienne, sous l’impulsion du guitariste George Harrison, à la musique classique et même baroque, dont George Martin est un expert. Les musiciens sont par ailleurs devenus familiers d’un grand nombre d’instruments comme l’orgue Hammond et le piano électrique ; leur palette instrumentale couvre maintenant les instruments à cordes, à cuivres, à vent, à percussion, sans oublier un nombre important d’instruments indiens comme le sitar, la tampura et diverses percussions hindoues, grâce à George Harrison, très intéressé à introduire ces sons dans la « musique occidentale ». L’ensemble de ces évolutions, qui concerne aussi l’écriture des paroles, est arrivé à maturation au moment des sessions de Sgt. Pepper.
La période Sgt. Pepper coïncide aussi avec l’introduction de quelques innovations musicales importantes. Le travail d’autres musiciens tels que Bob Dylan, Frank Zappa, Jimi Hendrix, Phil Spector et Brian Wilson (l’influence de Pet Sounds se fait sentir) redéfinit radicalement ce qui était possible pour les musiciens pop en termes d’écriture et d’enregistrement. Les technologies de studio ont atteint un haut degré de développement et de grandes innovations sont encore à venir. Les vieilles règles de l’écriture sont abandonnées, et des thèmes lyriques complexes sont explorés pour la première fois dans la musique populaire. Les chansons deviennent plus longues, le point culminant étant atteint dans les années 1970 avec, par exemple, les groupes de rock progressif tels que Pink Floyd et ses titres s’étalant sur une face entière de 33 tours, comme le morceau Echoes
Concept de l’album
Dans cet album, la « Fanfare du Club des Cœurs Solitaires du Sergent Poivre » accueille le public à son concert. L’album Sgt Pepper est ce concert, et tout, jusqu’à la pochette innovante — elle s’ouvre, elle contient les paroles des chansons imprimées au dos, elle est munie d’une planche d’accessoires à découper, une première dans le rock — et débordante de couleurs, fait de ce disque un pionnier de l'album-concept, ne serait-ce que par son retentissement. Le biographe Steve Turner écrit : « presque toutes les conventions régissant les 33 tours furent transgressées ».
Pourtant, au-delà du personnage de Billy Shears (interprété par Ringo Starr), qui fait le lien entre la chanson-titre et With a Little Help from My Friends, les chansons n’ont pour la plupart aucun rapport entre elles. Afin d’assurer la cohérence du projet, le groupe, sur une idée de son assistant Neil Aspinall, décide de reprendre la chanson-titre en avant-dernier morceau (« merci, nous espérons que vous avez aimé le show, nous sommes désolés mais il est temps de partir »), plus vite, plus rock et dans une autre tonalité. Et parfois, le hasard fait bien les choses ; le cri du coq que l’on entend à la fin de Good Morning Good Morning est dans la même tonalité que le premier accord de la reprise de Sgt Pepper et permet donc de lancer celle-ci.
L’album se clôture par la longue décroissance d’une note de piano — jouée simultanément sur tous les pianos disponibles dans les studios Abbey Road par plusieurs personnes —, un sifflement à 20 Khz, inaudible par l’homme mais destiné à faire aboyer les chiens, et un « jingle » sans fin sur le sillon intérieur.
Si Sgt. Pepper n’est pas un album-concept au sens strictement musical, il en est un tout simplement parce que ses auteurs l’ont pensé ainsi et l’ont fait savoir.
Écriture des chansons
La réussite de Sgt. Pepper est encore largement le fruit de la collaboration entre John Lennon et Paul McCartney dans l’écriture de la plupart des chansons. Il y a celles entièrement co-écrites, comme With a Little Help from My Friends en partant d’une simple idée de départ de Paul — la phrase « avec un peu d’aide de mes amis » — . Toute la chanson est développée dans l’idée de la confier à Ringo Starr et d’en faire un dialogue entre le personnage de Billy Shears et un chœur qui lui pose une série de questions.
Il y a celles composées par Paul avec un ajout décisif de John. Sur Getting Better, c’est ce dernier qui contrebalance l’optimisme de son partenaire, en ajoutant « it can’t get no worse » (« ça ne peut pas être pire ») derrière les paroles de Paul « It’s getting better all the time », et qui écrit le pont de la chanson. Lorsque Paul part d’un fait divers pour composer She's Leaving Home, John ajoute le chœur grec en réponse des parents, incapables de comprendre la fugue de leur fille.
Il y a celles écrites par John avec le concours de Paul. Lorsque Lennon démarre avec un dessin de son fils Julian pour Lucy in the Sky with Diamonds, McCartney trouve des paroles, comme « cellophane flowers of yellow and green ». L’apport peut aussi être musical, comme par exemple les fameuses notes de mellotron composées par Paul pour l’introduction de Strawberry Fields Forever.
Le résultat le plus remarquable, et inédit, est constitué par A Day in the Life. Dans ce cas très particulier, il y a une chanson de John (« I read the news today oh boy ») et une autre de Paul (« woke up, fell out of bed... »). Les deux compères les assemblent, s’amusent à écrire la phrase de liaison sévèrement connotée « I’d love to turn you on », et les transitions entre les deux parties. Ce sera la seule fois, avec plus tard deux titres du medley d’Abbey Road que deux chansons distinctes des auteurs-compositeurs sont assemblées et enregistrées ensemble d’une seule traite.
L’inspiration, elle, prend des formes multiples : la lecture des journaux pour A Day in the Life ou She’s Leaving Home, la reproduction du texte d’une affiche de cirque du XIXe siècle pour Being for the Benefit of Mr. Kite!, le souvenir du batteur temporaire des Beatles en juin 1964, Jimmy Nicol, pour Getting Better, la sonorité du mot « meter maid » pour Lovely Rita, les travaux de restauration d’une vieille ferme écossaise pour Fixing a Hole, un hommage musical de Paul à son père Jim pour When I'm Sixty Four, le dessin de Julian Lennon et les œuvres de Lewis Carroll pour Lucy in the Sky with Diamonds, une publicité télévisuelle vantant une marque de céréales pour Good Morning Good Morning, la musique de son ami Ravi Shankar pour George Harrison dans Within You Without You, ou encore, la nostalgie de l’enfance à Liverpool pour Paul dans Penny Lane et John dans Strawberry Fields Forever, toutes deux sorties en single séparément de l’album.
Innovations techniques
Les innovations en termes d’enregistrement sont nombreuses pour Sgt. Pepper et marqueront durablement l’industrie du disque et la façon de considérer le travail en studio.
Par exemple, les ingénieurs des studios Abbey Road inventeront pour les Beatles le vari-speed, un nouveau bouton sur le magnétophone qui permet de faire varier la vitesse de défilement de la bande. On enregistre ainsi la voix en faisant tourner le magnétophone plus lentement puis on le remet à vitesse normale. Ce procédé est notamment utilisé pour modifier le timbre de la voix de John Lennon sur Lucy in the Sky with Diamonds. On peut aussi s’en servir pour relier deux prises enregistrées à un tempo différent, comme sur Strawberry Fields Forever.
George Martin et son équipe technique ont également inventé la « synchronisation » de deux magnétophones 4-pistes, à travers une fréquence émise d’une machine vers l’autre, utilisée pour enregistrer l’orchestre symphonique exécutant la fameuse « montée » dans A Day in the Life, tandis que tourne la bande où jouent les Beatles, et le reduction mixdown (également appelé bouncing), qui permet de transférer les quatre pistes — il faut se souvenir qu'en 1967, c'est le maximum dont ils disposent — enregistrées sur un magnétophone pour n’en faire plus qu’une seule sur un autre, libérant ainsi trois nouvelles pistes. On peut multiplier le procédé, mais avec une certaine limite : quatre fois (soit un 16 pistes virtuel) constituera le maximum permis pour ne pas avoir trop de dégradation du son.
Les Beatles utilisent des pédales wah-wah et un fuzzbox, qu’ils transforment avec leurs propres idées expérimentales, comme faire passer des voix et des instruments à travers une cabine Leslie. Une autre innovation sonore importante est la découverte de la technique de la boîte de direct par Paul McCartney, dans laquelle on peut enregistrer la guitare basse en la branchant directement dans un circuit amplifiant de la console d’enregistrement. Paul enregistre désormais toutes ses parties de basse à part, et souvent à la fin.
George Martin demande également à l’ingénieur Geoff Emerick de lancer des bandes musicales en l’air, puis de les recoller au hasard afin de tenter de produire les sonorités de cirque demandées par John Lennon sur son titre Being for the Benefit of Mr. Kite!.
A bientôt pour la suite, y'a tant à dire sur cet album ;-)
Dernière édition par pilou le Ven 2 Jan - 15:47, édité 3 fois