une critique du deuxième album de Clarika "ça s'peut pas", qui qui contient mon titre coup de coeur, repris dans le quatrième album ('tain, je savais pas qu'elle en avait sorti quatre...
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" d'antoine mondor zoomrang.com
Vous connaissez le Syndrome du Vieux Croulant?
Moi si : j'en suis atteint, je l'avoue, côté chanson, française surtout.
Kézako? Comme son joli nom l'indique, le Syndrome du vieux croulant, ou SVC, consiste pour quiconque a passé un âge X - variable selon les individus, environ 35 ans dans mon cas - à se torturer les méninges chaque fois qu'il n'aime pas telle ou telle chose «nouvelle», ou prétendue telle.
La chanson française des dernières années a été, chez moi du moins, des plus propices à la manifestation de violentes crises de SVC.
Quelques exemples? Tiens, un seul, pour éviter d'égratigner un certain nombre de «petits nouveaux» à l'occasion d'un texte finalement bassement thérapique : «M», le fils de Louis Chedid puisque lui-même se réclame volontiers de papa.
Eh ben j'ai adoré papa, longtemps, malgré des épisodes d'infidélité et un ennui certain depuis quelques années. Les premiers albums du «vieux» étaient bien, et son come-back du début des 80, avec Ainsi soit-il et Panique organisée entre autres, apportait vraiment quelque chose.
Fiston? Bof! Il fait des efforts, c'est vrai. Et il a du talent pourtant (je dis ça pour être aimable parce que, personnellement, je suis convaincu que tout le monde en a : suffit de savoir l'exploiter).
Qu'est-ce qui cloche alors? Encore et toujours la même chose, cette «éternelle même chose» qui, depuis des années, me provoque une crise de SVC à l'écoute de plus de 50 % des nouveautés (pourcentage volontairement vague) de la nouvelle-nouvelle-nouvelle chanson que vous savez.
Kézako cette «éternelle même chose»? Bon, j'y viens, je lâche le morceau : c'est cette foutue manie de vouloir absolument faire «léger», à tout prix. Cette manie qu'ils ont tous ou presque de crier sur les toits qu'ils ne se prennent pas au sérieux et, comme si ce n'était pas assez, d'expliquer en long, en large et en travers, qu'il y a beaucoup d'«humour» dans «tout ça».
Je m'en fous de leur «humour», de leur légèreté obligée, de leur détachement de bon ton.
J'en ai marre, ça me donnerait presque envie d'écouter Aznavour, c'est vous dire!
Attention : ce n'est pas que la chanson légère, «drôle», m'horripile, j'adore ça. Pour tout vous dire, je n'aime jamais tant Jacques Brel, qu'étrangement je n'adore pas, que quand il est léger. Et je me suis régalé du CD de Valérie Lemercier, j'aime quand Charlélie me fait rire, ou sourire, j'aime Barbara quand elle chante «Elle mangeait des petits gâteaux», j'aime Juliette quand elle beugle que «Tout est bon dans l'cochon», je bande sur Nina Hagen quand elle y va à fond.
Mais je déteste l'humour obligatoire, aussi pseudo léger qu'omniprésent, allez, je me répète, «obligatoire», c'est vraiment le mot. Surtout celui des mâles, grands spécialistes de la chose. Être drôles, ou à tout le moins légers, voilà, c'est tout ce qu'ils ont trouvé pour ne pas faire jeunes filles en fleurs, fleur bleue, eau de rose ou autrement roses.
Je veux bien, mais une simple question Messieurs : êtes-vous certains que votre légèreté ne cache pas quelque part une impuissance à aller au fond des choses, et d'abord de vous-mêmes?
Je vous laisse méditer là-dessus, j'ai assez perdu de temps avec cette poussée cosmique de SVC, je vais de ce pas faire ce que je fais quasi immanquablement quand de tels épisodes se produisent : me mettre Clarika. Elle me console de tout, elle me console de vous, en me faisant pleurer, et rire ne vous en déplaise.
«Le» Clarika qui me fait tout ça est le second album de Clarika : Ca s'peut pas, qu'il s'appelle.
En voilà un foutu bon disque de nouvelle chanson française.
La musique va tous les sens, connus, moins connus et inconnus, on se régale, tant pis si c'est un peu longuet ou atonal par moments.
La voix : on s'en fout. Cette fille, contrairement à d'autres, a des choses à dire, alors on se tait et on écoute.
Oui, le plus beau est dans les textes, mais n'ayez pas peur : Clarika a un rare sens du rythme et débite les perles de sa plume avec brio, âme et conviction, trois qualités pas si courantes par les temps qui courent, dixit Mister SVC.
Alors allez-y, glissez d'un main virile le Clarika dans la platine et sortez vos mouchoirs pour pleurer de rire par moments, pour pleurer des rivières aussi. Coeurs de pierre, mettez-vous la pièce titre, Non ça s'peut pas : ça s'peut pas que vous n'en écrasiez pas une, allez, une petite, en cachette, aucun risque d'avoir l'air... «pédés».Tiens, puisqu'on en parle, y a même une vraie belle et bonne chanson de Clarika sur le «sujet», comme ils disent, Avec Luc. Contrairement à une certaine Christine Boutin, elle est belle et tendre, et n'a rien à voir avec les trois mille variations-sur-Ziggy qui donnent bonne conscience à qui l'on sait. Et en prime, elle est drôle.
À bons entendeurs salut
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